" Une chance folle " Anne GODARD
Une chance
folle
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142 pages
Anne Godard, née en 1971 à Paris, est une écrivaine française. Son premier roman, l'Inconsolable, paru aux Éditions de Minuit, a obtenu le Grand Prix RTL-Lire en 2006.
Quatrième de couverture (Editions de Minuit) :
Magda a été gravement brûlée lorsqu’elle avait quelques mois. Elle ne se souvient pas de l’accident, mais sa mère en a noté les circonstances dans un carnet. Toute son enfance, les opérations, les pansements, les cures thermales se succèdent. Sa mère se consacre à elle, on lui dit qu’elle est bien soignée. En somme, elle a une chance folle.
Notre avis :
" Si j’avais une marraine fée, ce n’est pas une robe de bal que je lui demanderais, mais de m’arracher cette peau d’âne qu’on m’a greffée. "
Une bouilloire électrique, le fil trop long qui pend jusqu’au sol, une minute d’inattention, un bébé qui vadrouille à quatre pattes, et qui va droit dessus et tirer le fil.
La gêne, la curiosité, la fascination, le dégoût parfois, et le pire la pitié, la bouche qui pose enfin toujours la même question : « qu’est-ce qui vous est arrivé ? « Les seuls souvenirs de l’accident ce sont ceux de sa mère et ce sont ses mots à elle que Magda utilise pour expliquer cette chose sur elle qui est la trace d’une autre chose qu’elle a vécue. Chaque regard posé sur sa peau qui ressemble à du papier mâché la brûle depuis l’enfance.
La douleur fulgurante quand la peau greffée s’éveille, les bêtes qui la mordent, la piquent, la rongent partout sur sa cicatrice. A l’école les camarades qui se détournent, qui l’excluent de leurs jeux. La complicité avec son frère, né la même année, à onze mois d’écart, ces deux-là font la paire comme on dit. Mais bientôt elle détestera tout ce qu’il aimera, et lui un jour il va se barrer, car il a besoin d’air. Les vacances en Sologne où la tribu des cousins est reconstituée. Aurore, la petite sœur, morte un matin de ne pas s’être réveillée.
14 ans l’adolescence, on s’habitue à être sifflée, suivie, frôlée, insultée parfois. Le corps qui s’éveille, les premiers désirs, mais qui pourrait désirer un corps brûlé ? Le lycée, les premières manifestations, et le sourire de Markus.
Souvenirs d’enfance et de souffrance portés par une écriture très accomplie. Un roman qui étonne par son intensité, surtout dans la première partie et la justesse des mots pour décrire cette relation difficile que la narratrice a avec une mère omniprésente dont elle se sent la débitrice, une mère qui la panse et pense pour elle. Une fillette étouffée et isolée dont les brûlures physiques et psychiques se mélangent. Anne Godard réussit à aller au fond de l’âme de son héroïne, dont elle démonte les tourments psychologiques. Un livre qui laisse une impression très forte une fois refermé et qui devrait faire partie, sans aucun doute, des sélections des prix littéraires de cet automne
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Note rédigée par Yves, juin 2017
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